Groupe Genève cinq cents mètres de ville en plus
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Genève 500 mètres de ville en plus

Non à des logements sur le site Artamis et à la Jonction!


L'INVITÉ

RAYMOND SCHAFFERT.
Membre de «500 mètres de ville en plus»
Ancien directeur de l'aménagement au DAEL

Tribune de Genève mardi 3 juin 2008

Lors de deux débats publics des «mardis de la Fondation Braillard», l'un consacré à l'avenir du site d' Artamis (ex SIG), l'autre à la présentation des projets du concours Europan à la pointe de la Jonction (dépôt TPG, ex-usine Kugler), dont je relève la qualité des propositions, j'ai exprimé l'opinion de ne pas construire de logements en ces lieux mais de les affecter en priorité à des espaces et équipements ouverts au public, dont le manque risque de se faire cruellement sentir à l'avenir, vu la surdensification du centre urbain. Il s'agit de donner la prééminence du droit à la ville sur le droit au logement.

Autrement dit, le philosophe Henri Lefebvre l'avait compris il y a près de quarante ans, le droit à la ville s'inscrit dans une démarche qui vise tout l'urbain et pas seulement l'une ou l'autre de ses soi-disant parties: logement ou transports. Logement, oui, surtout en maintenant les logements bon marché, mais aussi lieux de culture, d'enseignement, de loisir, de travail, cafés, etc.

Après des siècles de cadre bâti urbain homogène, face à des formes composites, hétéroclites, disparates, certains en viennent à ne plus reconnaître la ville, voire prétendent qu'elle n'existe plus. D'autre part, le problème se complique encore un peu lorsqu'il s'agit de définir la vraie ville, celle qui s'étend économiquement, socialement, culturellement et morphologiquement bien au-delà des limites de son territoire d'origine.

La difficile émergence d'une définition de la ville, qui correspond à son développement réel, s'explique notamment par la permanence des limites idéologiques traçant, soit la ville centre, soit la ville historique, mais surtout des limites politiques et administratives définissant les communes.

Le droit à la ville s'exprime sur la totalité de son territoire, y compris le centre. Celui-ci doit prendre une nouvelle dimension dans la ville transfrontalière qui compte déjà 800 000 habitants. Il doit être accessible à tous, surtout aux plus démunis. La course au centre est en train de les en exclure, chassés par les activités haut de gamme bien sûr, mais aussi par ceux qui prétendent remplir tous les «vides» pour résoudre la crise du logement.

Certes le besoin en logements est manifeste. Le Conseil d'Etat lui-même s'est engagé, en signant le projet d'agglomération franco-valdo-genevois avec nos voisins français, à construire 50 000 logements sur le territoire du canton d'ici 2030. Mais la crise ne doit pas être prétexte à bourrer la ville de logements, et chasser les activités dites non rentables, pour protéger la zone agricole. C'est la qualité de la vie en ville, y compris au centre, qui doit être protégée.

Ceci me fait dire qu'il ne faut pas se laisser prendre à ce jeu. Par exemple à Artamis et la pointe de la Jonction où la priorité doit être le maintien et le développement des activités artistiques, artisanales et culturelles, ateliers et lieux ouverts au public, ainsi que des espaces de détente, de loisirs et d'enseignement, et pas la construction de logements. Un débat fructueux et ouvert est amorcé sur ces questions et ces espaces à enjeux, sur la ville, dans le cadre de «l'assemblée des mal logés» et de l'atelier urbanisme du Forum «art, culture et création». Ces deux plates-formes de réflexion et d'action seront, je l'espère, porteuses d'avenir et méritent d'être soutenues.

«C'est la qualité de la vie en ville, y compris au centre, qui doit être protégée»

Sur le sujet, voir le film «Paysage urbain» de Matthias Solenthaler, ce soir à 20 h au CAC Voltaire, projection suivie d'un débat.